« Contre cette agro-industrie qui fait disparaître des paysans », la Confédération paysanne compte « radicaliser » ses propos et ses actions pour faire entendre ses positions sur le foncier, la juste rémunération des producteurs et, plus globalement, « l’indispensable transition agricole ».
Avant même sa présentation le 31 janvier, le projet de loi issu des Etats généraux ne satisfera pas le syndicat.
Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération paysanne, aux côtés de Temanuata Girard, secrétaire générale, et Nicolas Girod, secrétaire national du syndicat, mercredi 24 janvier 2018. (©Terre-net Média)
« Le temps est venu de radicaliser notre discours et nos actions contre cette agro-industrie qui détruit l’agriculture paysanne », a expliqué Laurent Pinatel, porte-parole de la Confédération paysanne, mercredi 24 janvier 2018, lors d’un point presse.
« Dans les campagnes, le désarroi des paysans s’amplifie. Il y a une vraie attente autour de nos revendications en faveur d’une agriculture paysanne », a poursuivi le représentant.
A la veille de la présentation des vœux d’Emmanuel Macron au monde rural chez un agriculteur du Puy-de-Dôme adhérent du syndicat, et à une semaine de la présentation en conseil des ministres du projet de loi promis dans le cadre des Etats généraux de l’alimentation, la Confédération paysanne estime d’ores-et-déjà que « le projet de texte ne sera pas suffisant » et qu’il ne sera pas à la hauteur des propos tenus par Emmanuel Macron à Rungis en octobre dernier. « Augmenter le seuil de revente à perte et encadrer les promotions sont des mesures insuffisantes. Difficile de voir comment de telles mesures peuvent permettre un retour de valeur aux paysans. »
Sur le projet de loi résultant des Etats généraux, les représentants de la Confédération paysanne, qui ont rencontré dans la matiné Audrey Bourolleau, la conseillère agricole d’Emmanuel Macron, « espèrent », mais ont « de sérieux doutes ».
« Nous avons de sérieux doutes quant à la cohérence entre la ligne tracée à Rungis et sa traduction dans le texte par le ministre de l’agriculture. Comment sera défini le prixabusivement bas ? Quelles seront les conditions à la hausse du seuil de revente à perte ? Comment seront pris en compte nos coûts de production ? Tout cela n’est toujours pas fixé. »
Pour le syndicat, les négociations commerciales en cours entre transformateurs et distributeurs, « qui se passent très mal malgré la signature d’une charte d’engagement », sont le signe d’un nouvel échec de la prochaine loi. Pour compenser le déséquilibre du rapport de force entre producteurs, transformateurs et distributeurs, la Confédération paysanne demande à l’Etat d’assurer un « rôle d’arbitrage » dans les négociations. « Nous le constatons depuis des années. Le respect de la concertation par tous les acteurs défendu par le Gouvernement ne suffit pas », explique Nicolas Girod, secrétaire national du syndicat.
Une politique « insuffisante pour une transition agricole »
Au-delà du projet de loi à venir, la Confédération paysanne estime que la politique agricole conduite par Emmanuel Macron n’est pas suffisante pour une « véritable transition agricole » et « un juste revenu des paysans ». « Dans les plans de filière élaborés par les interprofessions, il y a une vision de filière, dans une logique de volume, mais pas de vision pour les producteurs », renchérit Laurent Pinatel.
Il y a pourtant, aux yeux des représentants de la Confédération paysanne, des « signaux positifs ». Au premier rang desquels figure l’abandon du projet d’aéroport à Notre-Dame-des-Landes. « C’est la première fois qu’on entend du gouvernement qu’il faut moins consommer de terres agricoles et que la vocation agricole de ces terres doit perdurer. Il faut maintenant laisser les acteurs locaux proposer des projets agricoles. Sur la « Zad », le retour de l’élevage est une évidence. »
L’année 2018 s’annonce intense pour le syndicat. « 30 % des agriculteurs ont plus de 55 ans. Nous sommes à un moment crucial pour l’agriculture. Souhaitons-nous un renouvellement des générations permettant le développement d’une agriculture paysanne pourvoyeuse d’emploi ? Ou laissera-t-on la robotisation, l’agrandissement ou le salariat se substituer aux paysans ? C’est toute la réflexion à poursuivre et concrétiser cette année. »
Le syndicat a également les prochaines élections Chambres d’agriculture dans son viseur. « L’échéance de janvier 2019 va rythmer notre année. C’est une élection importante, car elle détermine à la fois les forces qui géreront les Chambres d’agriculture, et surtout la représentativité syndicale. »