Retour sur l’AG 2021 // Table ronde autour de la Démocratie alimentaire

Retour sur l’assemblée générale des Ami.e.s de la Conf’

Le week-end du 27 novembre 2021, s’est déroulée l’assemblée générale de notre association à Bagnolet. Un plaisir de pouvoir enfin se retrouver ensemble pour discuter de l’année écoulée et prévoir celle à venir.

L’occasion aussi de partir à la rencontre des associations locales qui entourent Bagnolet. Nous sommes allés vendredi à la rencontre de l’association Le sens de l’humus. Ils entretiennent et font vivre une parcelle des Murs à pêches de Montreuil pour sensibiliser les habitant.e.s du quartier et des personnes précarisées, au jardinage et au recyclage, dans un esprit d’inclusion et d’hospitalité.

Les Murs à pêches, qu’est-ce que c’est ?

La trace d’une agriculture réfléchie, les murs servent à emmagasiner la chaleur pour permettre aux fruits de mûrir. Cette façon de produire, très technique, a été permise grâce à un débouché de prestige, celui du roi Louis XIV.

La fin de journée s’est déroulée sur le marché paysan qui se tient chaque vendredi à la Société régionale d’horticulture, plus communément appelée Jardin-école de Montreuil. Là aussi, le patrimoine, la transmission et l’insertion dans le tissu local sont au cœur de leur activité. Nous y avons retrouvé des paysans confédérés, a qui nous avons acheté de quoi faire un apéritif dînatoire et la soupe du dimanche midi.

Le samedi matin était réservé à la validation formelle des rapports financiers et d’activités 2020 (eh oui ! Les restrictions ne nous avaient pas permis de nous retrouver plus tôt !). L’article 8 des statuts a notamment été modifié, pour permettre le vote par correspondance et/ou à distance en cas de nécessité. Et nous souhaitons la bienvenue aux nouveaux.elles administrateurs.trices : Mathieu, Georges, et Christiane, un grand merci pour leur investissement.

Les référents des différents groupes locaux ont pu s’exprimer, exposer leurs projets et leurs difficultés. À ce jour une petite vingtaine de groupes existent ou se forment peu à peu.

Le repas nous a généreusement et délicieusement été servi par Les Monts de l’Utopie, une équipe qui vient régulièrement régaler les paysan.ne.s du Comité national de la Conf’ et qui est basée dans les Vosges d’où vient Thierry Jacquot, paysan du secrétariat national de la Conf’ qui fait le lien avec les Ami.e.s.

L’après-midi a été riche de partages d’expériences, nous avions la chance d’avoir avec nous :

  • Bénédicte Bonzi, anthropologue spécialisée dans l’aide alimentaire et dans les violences alimentaires.
  • Mireille Alphonse, adjointe au Maire, déléguée à la Transition, à la démocratie alimentaire et en charge de la Cantine publique à Montreuil.
  • Aurélien Denaes, cofondateur de tiers-lieux à Malakoff (92), Conseiller municipal délégué à l’alimentation, la restauration collective et aux circuits courts de la Ville de Malakoff.
  • Henry-George Madelaine, responsable de l’essaimage, du Champ Commun, société coopérative d’intérêt collectif / tiers-lieu à Augan (56)

Des témoignages éclairants, motivants, et inspirants pour aborder les thèmes de la démocratie alimentaire et de la souveraineté alimentaire. Ils se sont suivis d’échanges sur les leviers d’actions pour mettre en marche la démocratie alimentaire au sein des Ami.e.s de la Conf’.

Après la table ronde, des ateliers ont suivi, qui ont permis à chacun de s’exprimer, de comprendre les leviers d’actions possibles et ceux encore à imaginer !

TABLE-RONDE : A retrouver en vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=LVhWEAUs73U

Où et comment faire advenir la démocratie alimentaire pour que l’on puisse vraiment décider de notre alimentation ? 

Dans le cadre de notre campagne « Décidons de notre alimentation ! », nous souhaitons que les citoyens puissent avoir voix au chapitre en matière d’agriculture et d’alimentation dont nous devrions débattre de manière publique et démocratique.

Pour échanger sur le sujet, nous invitons autour de la table :

  • Bénédicte Bonzi, anthropologue spécialisée sur l’aide alimentaire et les violences alimentaires (post-doc à l’EHESS).
  • Mireille Alphonse, adjointe au Maire de Montreuil, déléguée à la Transition, à la démocratie alimentaire et en charge de la Cantine publique
  • Aurélien Denaes, co-initiateur de tiers-lieux à Malakoff (92), membre du Conseil National des Tiers-lieux, conseiller municipal délégué à l’alimentation, la restauration collective et aux circuits courts de Malakoff
  • Henry George Madelaine, co-gérant du Champ Commun, société coopérative d’intérêt collectif / tiers-lieu nourricier à Augan (56)
  • Thierry Jacquot, du secrétariat national de la Conf’, se dit citoyen avec fonction de « paysan », un métier d’utilité publique, altermondialiste, et écoute les échanges. 

Des questions et des constats vertigineux sont posés. Comment lutter contre la précarité alimentaire qui touche près de 10 millions de personnes en France ? Que faire contre la violence de notre système ? Comment se parler entre classes sociales et culturelles éloignées ? 

Les échanges avec les intervenants nous apportent des éclairages et des idées pour continuer à œuvrer pour plus de démocratie dans l’alimentation.

Pour mieux comprendre, il faut relier sécurité, souveraineté et démocratie

Je vois ces notions comme en escalier, chacune représentant un palier. Quand on n’est pas en situation de sécurité alimentaire, on n’arrive pas à penser à ceux qui produisent. On a donc d’abord besoin de sécurité. Quand on arrive à faire la différence entre une pomme et une autre pomme, qu’on arrive à s’approprier les différentes dimensions, qu’on sait qui fait quoi, on peut atteindre l’autre palier, la souveraineté alimentaire. Quand on ne se contente plus de penser mais qu’on veut développer des parallèles et agir, c’est le dernier palier, la démocratie. (Bénédicte)

L’alimentation est vitale et essentielle pour le vivre-ensemble. 

C’est une formidable clé pour renouer avec la démocratie. L’accès à l’alimentation, c’est le premier sujet politique qui existe, c’est le premier qui nous rassemble car on est tous humains, on a tous besoin de manger. Le commun essentiel de manger ensemble, cet acte-là c’est la base de la politique. C’est le levier qui va nous permettre de redonner envie de faire de la politique ensemble, les gens comprennent bien qu’il y a là quelque chose d’essentiel. (Mireille)

Des lieux pour faire vivre la démocratie

Le tiers lieu, c’est un échelon manquant dans notre société. Il y a les associations mais il faut aussi des espaces de rassemblement et de (re)politisation, des lieux pour organiser la révolution. La démarche est « fonctionnelle » : on rentre dans un tiers-lieu par l’envie de manger, de travailler, de rencontres, on discute, on vit un échange émotionnel, on fait la fête, on vit des choses fortes ensemble. Les gens attaquent les sujets alimentaires par le « fonctionnel » (besoin de manger) et pas d’abord par le politique. » (Aurélien)

« La démocratie alimentaire, c’est répondre à des besoins qui ne sont pas que physiologiques et culinaires mais aussi sociaux. Notre lieu « Le Champ commun » est une réponse à des manques en milieu rural. Ce n’est pas qu’une épicerie, c’est un lieu de convivialité, au centre du bourg, » (Henry-George)

« Les marchés paysans sur la place Jean Jaurès, à Montreuil, ça a fait beaucoup pour la prise de conscience sur ces sujets. » (Mireille)

Pour des réseaux entre communes

– un réseau d’élus municipaux délégués à l’alimentation

Il y a de plus en plus d’élus délégués à l’alimentation en mairie. C’est un signal politique conséquent. Il faut qu’on travaille ensemble, pourquoi pas à travers un réseau. (Aurélien et Mireille)

– repenser les liens entre territoires

Les élus doivent se lier avec d’autres territoires, d’abord par le biais de la restauration collective, l’organisation de la filière, la coopération entre paysans…(Aurélien)

On ne peut pas faire de l’hyperlocal, même à la campagne, il faut se parler entre territoires. (Aurore)

Faire des jumelages avec des territoires ruraux, on va pouvoir construire des choses intéressantes en termes de solidarité entre les rats des villes et les rats des champs. Il faut aussi travailler avec les chercheurs et des spécialités différentes. (Mireille)

La SSA comme ligne d’horizon

La SSA, au début je n’y comprenais rien. Aujourd’hui ça me fait du bien parce que c’est une ligne d’horizon qui se dégage devant moi, un moyen de tout décomposer d’une part, et d’autre part, de remettre les morceaux du puzzle à une place juste pour ne pas reproduire ce système qui détruit des personnes et qui est insupportable. Il y a des choses à combattre, mais face à nous on a des moyens et des savoirs faire incroyables pour produire autre chose. (Bénédicte)

S’indigner, s’engager, expérimenter, essaimer, à toutes les échelles. Ne pas attendre que cela arrive d’en haut mais faire. 

« Cette indignation au nom d’une justice est viscérale. Aux Restos du cœur, j’ai appris la volonté, et l’engagement viscéral des bénévoles. Il y a  des résistances qui tiennent depuis longtemps. » Bénédicte

 « Il se veut modeste par principe comme un grain de sable bien solide dans les engrenages du capitalisme et de la croissance toujours plus forte. Accompagner des porteurs de projets locaux mais à condition qu’ils s’associent avec les citoyens pour la vitalité même du projet et sa pérennité. C’est un projet populaire. Horizon d’auto-gestion, participation citoyenne ou dans le partage de son expérience dans l’essaimage, une demande de sens d’abord.» Henry-George

« On peut dépasser les fatalismes qui bloquent les personnes dans leurs habitudes quand il n’y a pas de plaisir. L’idée c’est de faire ses courses, boire un coup, et écouter un concert, ne pas être que des consommateurs. Ces actions locales agissent au national ! Prendre un compte que nos actions modestes, elles agissent sur le global, et il y a de plus en plus de personnes conscientes, et demandeuses de faire bouger les choses. Longue vie à nos organisations, qu’elles se développent afin de nourrir les consciences, faire un modèle équitable et solidaire pour tous les peuples.»  Thierry

Restauration scolaire ? Être dans les instances ?

DÉMOCRATIE ALIMENTAIRE

Conceptualisée pour la première fois en 1998 par Tim Lang, la démocratie alimentaire désigne une volonté et une revendication des citoyen.ne.s à reprendre le pouvoir sur la façon d’accéder à leur alimentation, en lien avec le modèle agricole qui la produit. Dominique Paturel, chercheuse à l’INRAE autour de l’aide alimentaire, y ajoute la notion de « justice sociale – à travers l’accès, la participation et le pouvoir d’agir – et celle de citoyenneté, et ce pour l’ensemble des acteurs du système alimentaire (producteurs, transformateurs, distributeurs, consommateurs). Voir définitions dans les deux ouvrages récents Le droit à l’alimentation durable en démocratie de 2020 et Nourrir : quand la démocratie alimentaire passe à table de 2021.

Nous sommes ainsi intéressés par les mécanismes et dynamiques qui visent à ce que les citoyens puissent avoir voix au chapitre sur ces enjeux dont nous devrions débattre de manière publique et démocratique. 

Nous connaissons des initiatives qui sont portées par la société civile comme les AMAPS, d’autres qui se sont institutionnalisées comme les PAT (projets alimentaires territoriaux), d’autres encore qui semblent être dans un processus d’institutionnalisation comme la dynamique actuelle pour une mise en réseau de tiers-lieux, notamment de tiers-lieux nourriciers suite à une recherche-action en 2019-2020 sur ces lieux (cycle de webinaires actuellement). Des collectifs dont les Ami.e.s de la Conf’ sont membres se sont créés pour agir sur les politiques publiques phares ayant un impact sur l’alimentation comme

  • « Pour une autre PAC » qui souhaite un changement de modèle et revendique une place plus importante des citoyens dans les décisions
  • ou bien le « Collectif pour une sécurité sociale de l’alimentation » qui cherche un outil pour rendre effectif le droit à l’alimentation via un système inspiré de la sécurité sociale de santé.
  • On peut également penser aux collectifs autour de la restauration scolaire qui existent très localement et qui ont influencé des décisions à l’échelon municipal, ainsi que les mesures de la loi EGalim pour la restauration scolaire.

TABLE DE LIBRAIRIE

Ressources bibliographiques : 

– Notre kit de mobilisation des Ami.e.s de la Conf’ 2019 pour « Décidons de notre alimentation » http://lesamisdelaconf.org/wp-content/uploads/LACP-Kit-de-mobilisation-WEB-1.pdf

-Notre kit « Regards d’Ami.e.s de la Conf’ sur le rôle des régions » : http://lesamisdelaconf.org/2021/05/17/regards-dami-e-s-de-la-conf-sur-le-role-des-regions/

– Livre Le droit à l’alimentation durable en démocratie– ouvrage collectif de Dominique Paturel et Patrice Ndiaye (2020)

– Livre Nourrir : quand la démocratie alimentaire passe à table de François Collart Dutilleul (2021)

– Brochure « Les Tiers-Lieux Nourriciers, engagés pour la transition agroécologique et alimentaire » (2020) : https://nourriciers.tierslieux.net/?Banque

https://securite-sociale-alimentation.org/

https://pouruneautrepac.eu/politique-agricole-et-alimentaire-souhaitee/

– Article « Les projets alimentaires territoriaux (PAT), entre rupture, transition et immobilisme ? » Gilles Maréchal, Julien Noel, Frederic Wallet : https://hal.archives-ouvertes.fr/hal-02139732/document

– Livre The Great Good Place: Cafes, Coffee

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